claire angelini – par l’eau et par le feu

 

En témoignage de l’absence et pour traiter le théâtre d’un drame désormais effacé après quatre années d’oubli, Par l’eau et par le feu prend le parti d’une succession de plans fixes délibérément immobiles qui offrent à la contemplation la neutralité d’un espace urbain ordinaire.

Sur ces plans « photographiques » scandés par des événements visuels minimaux — l’évanescence d’une ombre sur un échafaudage, une colonne de fourmis sur un arbre, des voitures qui se reflètent dans un fragment de vitre — viennent cogner par trois fois d’autres régimes visuels et sonores, en autant d’indices de la violence sous-jacente à ce paysage tranquille. C’est d’abord la façon dont une voix se met à marteler des images évoquant l’incendie, où la force des mots est relayée par une profération apparentée rythmiquement au rap. C’est ensuite la façon dont l’actualité de l’immigration clandestine en méditerranée surgit, document noir opposant sa lame de fond visuelle et sonore au paysage urbain. Enfin, c’est un mouvement inattendu et soudain de la caméra qui nous rapproche brusquement de la condition qui fut celle des victimes assaillies par le feu, tandis que le bruit lointain d’une sirène de pompier retentit une fois encore au-delà du chantier, en direction de la Seine où s’érigent les contreforts de la forteresse du Ministère des finances.


Un travail sur la forme

Le travail de l’image se conjugue ici à celui du texte. L’inscription des intertitres dans l’absence d’image raconte un espace-temps où s’est noué un autre drame en écho à celui-ci, telle une réaction en chaîne. Le rapport des deux est un centre de gravité où se noue la question du visible : que voir, comment saisir, se souvenir, être attentif au passé que le présent littéralement  éclabousse?

Dans l’espace de l’image se déploie le temps de ce qui a eu lieu et qui n’est plus visible. C’est donc le texte qui, en lançant l’imaginaire verbal du spectateur, fait image : une image de mots, tissée d’une violence (celle du texte lui-même mais aussi de la diction de l’acteur) qui perce la surface des plans. Car c’est aussi le texte qui brise l’unité quasi photographique du plan. Et c’est la voix qui crée l’image mémorielle. Elle reconstruit l’histoire de ce qui a eu lieu dans un temps où désormais tout a disparu. Le mot vient mettre l’image à l’épreuve, lui faire rendre ce qu’elle ne raconte pas mais donne pourtant : cet étrange mur aveugle noirci en son milieu, ce vêtement qui sèche pendu à une fenêtre, au-dessus d’un container.

       

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COMMENTAIRE

Par l’eau et par le feu : exploration de quelques modalités de présence de la langue en cinéma, et de quelques formes de la destruction, le film montre des enchevêtrements d’échafaudages, un chantier, dans la ville. Il montre surtout comment un espace peut se trouver inhabitable. Il montre enfin combien les guerres ne sont pas passées. Combien, au contraire, elles approchent.

Benoît Turquety, pointligneplan, Femis, Paris 2010



RESUME Deutch

Par l’eau et par le feu leistet Erinnerungsarbeit, gegen den abweisenden Widerstand der Baubretter und die gleichgültige Neutralität der Baustelle. Mit der Kamera fängt Angelini die scheinbare Banalität des Ortes ein. In fotografischen Einstellungen registriert sie jede minimale Regung, die sich ereignet. Die Lücke in der Häuserreihe wird unter ihrem Kamerablick zur Gedächtnisstätte eines finsteren Tages in der jüngeren Geschichte Frankreichs, und eine Ermahnung an Europa, das sich schwer tut, Immigration als Integration zu gestalten.(Dunja Bialas, festival Underdox 05, Munich 2010)                               

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PAR L’EAU ET PAR LE FEU

ON WATER AND ON FIRE

FILM


Le 25 août 2005, un immeuble vétuste brûle, au centre de Paris. L‘incendie fait 47 victimes, causant la mort de 17 personnes d’origine africaine, dont 12 enfants. Un chantier recouvre en 2009 la mémoire du lieu devenu méconnaissable.




France  l 2009  I DV I Couleur I 11 minutes


Image, son, montage: Claire Angelini

Interprétation: Marlon Samuel Legitimus

Langue originale: français

Sous-titres: anglais

Production: Claire Angelini

Mode de diffusion: en salle.




PROGRAMMATION


Rétrospective, Werkstattkino, Munich, 2016

Nuit de l’instant/ CIPM Marseille 2011

La FEMIS Paris 2010

Underdox 04 Munich 2010

Semaine asymétrique 2010

22èmes Instants vidéo Marseille 2009

 
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