claire angelini – brise-film

 

BRISE LA MER!

JEUNE, RÉVOLUTION

DEUX FILMS

INSTALLATION


Développer un cinéma politique

Deux protagonistes - une femme algérienne et un homme tunisien - évoquent la situation récente de leurs pays.

Le politique surgit là où le visible redistribué permet de poser autrement la série de problèmes engendrés par ce qui a eu lieu, dans l’Histoire ; quand aux cuves de pétrole du port de Béjaia, (Algérie), répondent les toupies d’abord fougueuses, puis de plus en plus lentes, d’une table de café tunisienne, de quel tour sur soi-même la révolution, dans l’un et l’autre de ces deux pays, a-t-elle été porteuse ?




France  l 2012  I HD I Couleur I 11 minutes


Réalisation, son, montage: Claire Angelini

Témoignage: Narriman Bougherara

Musique : Gérard Grisey

Version originale française.

Sous-titres allemand, anglais, espagnol.

Mode de diffusion : installation et salle

Production: ALBANERA


France  l 2012  I HD I Couleur I 13 minutes


Réalisation, son, montage, production : Claire Angelini

Images additionnelles : Kirpal Singh

Témoignage: Ikbel Zallila

Version originale française.

Sous-titres allemand, anglais, espagnol.

Mode de diffusion : installation et salle

Production: ALBANERA





PROGRAMMATION


Mittelmeer-Filmtage, Munich, 2014

Underdox 08, Munich, 2013

Rendez-vous de l’Histoire de Blois, 2013

Haus der Kulturen der Welt/ Rencontres internationales Paris-Berlin-Madrid, 2013

11èmes Rencontres de Béjaia Algérie 2013

La Compagnie Marseille 2013

Palais de Tokyo/ Rencontres internationales Paris-Berlin-Madrid, 2012

Homelands/Station 21 Zurich 2012

Ecole des beaux-Arts de Rennes 2012

Les Instants vidéo Friche de la Belle de mai Marseille  2012

Underdox 07 Munich 2012

KunstKinogarage Munich 2012



 

Brise la mer ! / Jeune, révolution ! met en rapport deux paroles sur l’histoire : celle de Narriman B., qui s’interroge sur les raisons de la guerre d’Algérie à l’occasion de la commémoration de l’Indépendance (1962). Et celle d’Ikbel Z., confronté au délitement de la Révolution de jasmin et au désenchantement de la jeunesse tunisienne.


Ces deux interlocuteurs énoncent un problème. Or, le premier parti pris de ce travail consiste à rabattre l’échange qui se noue au cours de l’interview, sur une série d’objets signifiants –tasses, sucrier, toupies. Escamoté, le corps invisible n’est plus qu’une voix qui rôde dans le temps, absentée des plans où pourtant quelques secondes plus tôt il y avait quelqu’un qui buvait, remuait sa chaise, se servait du sucre, etc. Cette substitution de la personne par l’objet, est générateur d’une tension que le montage par saccades et hachures accentue à l’image et au son (la musique de Grisey)  : ce sont des plans ambivalents de menace, de liberté ou d’attente : un fort militaire du XVI siècle, une façade que lézarde un arbre poussé à la verticale, les promeneurs d’un front de mer où passent les tankers, ou encore des petits pêcheurs algériens, une voie de chemin de fer à l’aube, une construction métallique disproportionnée en bordure de route, , un jeune couple sur les hauteurs de Sidi Bou-Saïd, une bibliothèque déserte et vide, un parc abandonné.


Jeune, révolution!

Comment parler de la révolution, dans un monde saturé d’informations ? Et quel défi pour le cinéma? ici quelques fragments de Tunis au loin, et surtout la voix d’un homme, Ikbel, confronté au délitement de la Révolution de jasmin et au désenchantement de la jeunesse tunisienne, cherchent à produire une autre lecture de l'histoire. 

politiquepolitique.htmlpolitique.htmlpolitique.htmlpolitique.htmlpolitique.htmlpolitique.htmlpolitique.htmlpolitique.htmlpolitique.htmlpolitique.htmlshapeimage_1_link_0shapeimage_1_link_1shapeimage_1_link_2shapeimage_1_link_3shapeimage_1_link_4shapeimage_1_link_5shapeimage_1_link_6shapeimage_1_link_7shapeimage_1_link_8

Jeune, Révolution!

par Marion Pasquier, revue Critikat, 2013

Jeune, révolution  ! 2007-2012, de Claire Angelini, est né à Bejaïa l’année dernière lorsqu’elle y présentait La guerre est proche. Lorsque, pour une exposition, lui a été passé commande d’un film sur les révolutions, c’est en plasticienne qu’elle y a répondu, en plasticienne qui d’œuvre en œuvre interroge le politique et l’Histoire. L’humain est ici une voix, celle d’Ikbel Zelila, professeur et critique tunisien rencontré à Béjaïa. En off, il raconte sa vision, à chaud, de la révolution en Tunisie  : les modalités de la rébellion inattendue de la jeunesse dépolitisée puis son désenchantement. Nous sommes dans un café, dont le bruissement sonore se déploie largement. À l’image, une table en verre posée sur des tapis colorés, une tasse de café consommé, une cuillère. À l’intérieur de cadres minutieusement découpés, la cinéaste explore les possibilités visuelles des objets, des formes, des couleurs et des lignes, elle compose des tableaux. En scansion du discours, sur cette table une toupie tourne sur elle-même, très vite d’abord puis plus lentement. Elle matérialise, symbolise, ce qui vient d’être dit. Comme l’objet, la révolution tunisienne, qui a déçu, semble être un mouvement vain. Mais la toupie, aussi, se déplace, le long d’une rayure sur le verre de la table. On va donc quelque part  ? La musique concrète de Gérard Grisey, tantôt violente et tantôt douce, convoque aussi une impression duelle. L’humain, d’abord présent par le détournement, à la fin apparaît frontalement. Après un lent panoramique sur le panorama depuis Sidi Bou Said, la caméra découvre un couple, au loin, dans un coin de plan. Un couple suggérant une certaine liberté qui pourrait être compromise par l’arrivée des islamistes au pouvoir. Nous sommes bien en Tunisie. Mais pas seulement. En faisant résonner dans la matière, dans son, le sens des mots, Claire Angelini ouvre son film sur un horizon bien plus large que la révolution du Jasmin. C’est la Révolution qu’elle interroge. En exergue du film, d’ailleurs, une citation de Robespierre. Jeune, révolution  ! 2007-2012 forme un diptyque avec Brise la mer  ! 1962-2012, un anniversaire, tourné à Bejaïa et qui met en scène la parole d’une algérienne à propos de la guerre d’indépendance.


Cette installation institue un espace géométrique qui part de cette définition de Malebranche : les carrés des temps des révolutions des planètes sont entre eux comme les cubes de leurs distances du centre commun de leur révolution. [De la Recherche de la vérité]

De part et d’autre de deux écrans déroulant simultanément les deux pièces sonores et visuelles – Brise la mer ! et Jeune, révolution ! –, le spectateur occupe la ligne de séparation au centre de deux surfaces réfléchissant par le décalage de leurs expressions à la fois la superposabilité des lieux entrevus (bords méditerranéens, populations désoccupées, paysages rural et industriel à la fois) et leurs différences saillantes (un fort du XVIe s., des tankers, des pêcheurs, une bibliothèque, un couple d’amoureux, etc).






La place du spectateur est celle de l’interlocuteur successif muet de deux témoins, protagonistes d’événements ayant affectés ces espaces-temps. Celle du visiteur venu deviser avec eux au café. Mais sa place réelle est celle de l’interlocuteur simultané de deux locuteurs dont les paroles ne se croisent qu’en lui, ne s’échangent qu’en lui, réceptacle, durant la projection en boucle, de ces deux paroles et pensées qui elles aussi parcourent l’espace et le temps.

Les deux espaces-temps se situent sur un pli. Ils s’ouvrent et se referment comme les feuilles d’un livre dont la symétrie, qu’on appelle miroir de la page, se révèle fausse, affectée d’un coefficient temporel (accompli, inaccompli) qui est de nature à interroger le sens même du syntagme déjà usé par la surenchère médiatique de « révolution arabe ». Là où elle a eu lieu, d’où elle est partie – la Tunisie –, là où elle n’a pas eu lieu pour, semble-t-il, avoir déjà eu lieu dans le mouvement appelé alors de « libération nationale » – l’Algérie. Circularité des deux moments que le spectateur peut avoir à épouser depuis son siège central, pivotant (point de vue), poursuivant ici et là alternativement la coïncidence impossible et la répétition d’une même figure déplacée dans le temps, celle de la révolution comme « Retour d'un astre au point d'où il était parti », scandé par la même musique devenue l’indice intemporel de ce mouvement de rotation qu'une ligne ou un plan déterminé décrit autour d'un axe immobile.


« Puis il y eu un blanc, un espace vide, un temps mort de longueur indéterminée pendant lequel il ne se passe rien, pas même l'attente de ce qui viendrait ensuite. » Alain Robbe-Grillet, Projet d’une révolution à New York (1970).

 

INSTALLATION